Namud était un grand chef et un chasseur renommé. Doué de pouvoir et de connaissance, il voulait dominer tous les hommes et osa s’attaquer à Roog (l’être suprême). Devant ses archers, il décocha les traits de son arbalète vers le dieu ouranien, espérant l’avoir atteint. Le soir, un coucher de soleil rouge de sang barrait la moitié du ciel. Namud annonça triomphant : « Je l’ai blessé ».
Le lendemain, de petits flocons blancs moutonnaient les nuages du ciel. Namud en conclut: <«< Roog n’est plus, je l’ai tué ». Quelques jours plus tard, après un grand vent, les courtisans apportèrent des os tombés du ciel. Namud les regarda : «< Roog se décompose » et il s’énivra de sa propre puissance.
La nuit suivante, les moustiques les plus petits, les Mutu-Mutu, le tourmentèrent beaucoup en prononçant son nom, « Namud ! Namud ! ».
Il ne savait pas que c’était Roog. Les moustiques entraient dans ses oreilles et certains, pensait-il, avaient déjà pénétré dans sa tête et parlaient. Il ne pouvait les faire sortir. C’est alors qu’il eut l’idée de changer de tête. Lui qui était doué de pouvoir, il pouvait réaliser cette prothèse inouïe. Il convoqua ses bijoutiers et forgerons qui, impassibles, l’écoutèrent et réalisèrent une tête d’or d’une beauté fulgurante.
«Mbatinyo xoox leeke too nu mbi’anaam xoox wurus ».
«Enlevez-moi cette tête et mettez à la place la tête d’or », ordonna-t-il. Ainsi firent-ils.
Les forgerons enlevèrent sa tête et fixèrent sur le cou la tête d’or. Le roi reposait sur son lit, magnifique. Pendant plusieurs heures, les courtisans se penchérent au-dessus de lui, en désaccord. Les uns disaient qu’il reposait et dormait. Les autres disaient qu’il ne vivait plus. Il fallut bien admettre qu’il était mort. Alors on construisit un monument funéraire digne de lui.
Mais les chiens du pays détruisirent le monument et dévorèrent le corps du roi sans rien en laisser, sauf la tête d’or.